CHARLEROI // Patrick Willocq
Du 26 janvier au 12 mai 2019 -
Musée de la photographie - Centre d'art Contemporain de la fédération Wallonie //
Patrick Willocq - Songs Of The Walés
Direction Charleroi au Musée de la Photographie pour découvrir les œuvres de Patrick Willocq. Une exposition surprenante et superbe dans ce temple européen de la photographie. Parce que ce ne sont pas « que » des photographies que l’on va admirer ici, c’est un « récit », celui d’une tradition orale perpétuée dans les contrées de la République démocratique du Congo, c’est l’histoire des Walés. Ça ne vous parle pas ? C’est normal. Patrick Willocq a vécu 7 années au Congo et a été initié aux rites et coutumes locales, confidentielles, intimes. L’artiste nous livre dans un véritable tableau photographique, peuplé de portraits, de papiers peints et d’installations, la retranscription visuelle des fragments vécus par toute mère congolaise. Ce rituel incanté dans la région depuis des générations, on peut tenter de le raconter ainsi : les Walés, autrement dit les « mères allaitantes » venant de donner naissance à leur premier enfant sont alors prises en charge par leurs parents, isolées pour une période qui peut être assez longue parfois jusqu’à 5 années, et ce afin de les former dans leur rôle de mère, avec un certain nombre d’usages traditionnels et d’interdictions pour permettre à la jeune maman de confiner sa bulle et d’achever sa préparation. Au terme de cette période de réclusion, la Walé sera invitée à offrir un spectacle codifié, en exprimant par le chant et la danse ses désirs, ses rêves, son expérience, sans hésiter d’ailleurs à discréditer les autres Walés pour marquer la supériorité de son clan. La cérémonie de trois heures se termine par l’envol de la Walé dans les airs depuis une nacelle, à la condition un peu plus triviale que son époux ait pu de son côté s’acquitter des frais du spectacle et des soins apportés à sa femme… Mais ici c’est toute cette tradition qui se raconte superbement, en images autant qu’en imaginaire, dans une palette de couleurs vivifiante, enveloppé par les magnifiques chants des Walés. Une manière singulière et inédite de raconter ce rite symbolique, avec tendresse et poésie. Vous y verrez dans un style photographique à mi-chemin avec la peinture pour ses couleurs et le théâtre pour ses mises en scène, d’étonnants décor de nattes, des feuillages de bambous, des trompe-l’œil végétaux et bigarrés… L’artiste a demandé aux Walés de devenir les ordonnatrices et actrices de leur photographie, de leur œuvre. On nous y parle de désirs de voyages en avion ou en bateau, d’hommes volages et repentants, de rêves de femmes méchantes et tentatrices suspendues aux branches, et même de ce petit homme blanc qui vient les photographier au volant de sa jeep et qui aurait pu faire un bon mari… Qui sait ?