C’est un chef-d’œuvre que l’on croyait immobile, indéplaçable, enchâssé dans la pierre romaine du palais Farnèse. Et pourtant, le Louvre ose un geste inédit : ramener à Paris, façon puzzle, l’un des plus grands trésors de la peinture occidentale. Non pas en transportant les fresques, mais en révélant les dessins, ces matrices fragiles et sublimes qui leur ont donné naissance. Car derrière la splendeur baroque de la Galerie Farnèse, il y a des traits de craie, des encrages nerveux, des esquisses fulgurantes – un monde d’idées, de tentatives, de génie en ébullition.

Pour la première fois, le public pourra embrasser d’un seul regard la plus vaste collection au monde de ces dessins préparatoires, de l’ébauche griffonnée aux cartons monumentaux. Il y a là, dans ce chœur de papiers vibrants, l’âme même d’Annibale Carracci, maître d’œuvre de cette voûte céleste, salué comme le Michel-Ange du XVIIe siècle. À travers ces feuilles d’étude, c’est toute l’histoire d’une fascination européenne qui s’écrit – celle d’un décor devenu mythe, qui inspira Versailles comme l’Opéra Garnier.

L’exposition dévoile aussi un secret oublié : les derniers fragments d’une réplique française de la Galerie Farnèse, commandée par Louis XIV pour les Tuileries. Et plus encore, une reconstitution immersive du Camerino, l’antichambre de la galerie, confiée à Annibale comme galop d’essai – où déjà son génie surgit dans la composition et la lumière.

Un parcours, grandiose, comme une élégie. Car derrière les fresques triomphantes, il y a la silhouette d’un homme jeune, exalté, consumé par l’œuvre. Annibale, épuisé par la tâche, ne peindra presque plus après ce chef-d’œuvre. Ce que l’on admire ici, c’est son chant du cygne – un sommet d’inventivité, une épreuve de force, une offrande au regard.

MUSÉE DU LOUVRE
Du 5 novembre 2025 au 2 février 2026
Tous les jours sauf le mardi, de 9 h à 18 h, mer. et ven. jsq. 21h
Tarif : 22 € - Gratuit - 26 ans