Exposition Dans le Flou, une autre vision de l’art de 1945 à nos jours, au Musée de l'Orangerie
Musée de l'Orangerie
Du 30 avril au 18 août 2025
Dans un monde obsédé par le contrôle et la netteté, cette exposition s’impose comme un geste de résistance esthétique et intellectuelle, une invitation à réenchanter nos perceptions.
Pourquoi le flou – souvent perçu comme une imperfection ou une faiblesse – est-il devenu, à partir de 1945, un langage plastique et politique majeur ? Pour répondre à cette question, l’exposition commence là où tout s’effondre : les ruines de l’après-guerre. Les artistes, confrontés à un réel dévasté, tournent le dos aux certitudes bien dessinées.
Le flou devient une manière de dire ce qui nous échappe, de capter l’éphémère, de rendre visible ce qui ne l’est pas. Une vision du monde à rebours qui révèle l’évidence, comme avec cette immense toile de Hans Hartung, traversée de traits brumeux. Des marques incertaines, presque effacées par endroits, qui évoquent moins un paysage qu’une mémoire fragile, prête à se dissoudre à tout moment. Ici l’art modèle l’indistinct. Des photographies faussement mal imprimées de Gerhard Richter reprenant une superposition d’écrans pour interroger notre rapport insaisissable à la mémoire, aux images volatiles de Mircea Cantor qui se dérobent à toute interprétation, le parcours fait dialoguer des œuvres inattendues, rompant les frontières entre médiums et époques.
A l’autre bout du spectre revient Monet, inévitable, mais vu autrement. Ses Nymphéas, longtemps admirés pour leur abstraction précoce, réapparaissent comme des ancêtres directs de cette esthétique. La surface de l’eau devient une métaphore parfaite du flou : reflet tremblé, illusion mouvante, frontière indécise entre l’air et l’eau. On découvre un Monet moins impressionniste qu’impressionné, presque hanté par ce qu’il ne pouvait pas saisir totalement. Esthétique de l’inachèvement, éloge du doute, revendication de l’ambiguïté comme un nouvel espace de liberté… à travers ces œuvres, nous comprenons que le flou n’est pas un accident, mais un choix : celui d’un regard qui accepte l’instabilité du monde.
Le saviez-vous ?
Le flou n’est pas qu’une affaire de technique ou de style. À l’ère des appareils photo instantanés, les avant-gardes photographiques, menées par László Moholy-Nagy, utilisent volontairement la perte de netteté pour s’opposer à l’esthétique documentaire. Une manière de rappeler que ce que l’on croit voir n’est jamais toute la vérité.
MUSÉE DE L’ORANGERIE
Du 30 avril au 18 août 2025