À la loupe - Sonia Delaunay, Prismes électriques

 

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Sonia Delaunay, Prismes électriques, 1913-14





Modernité urbaine

Sonia Terk, future Madame Delaunay, a 21 ans lorsqu’elle quitte l’Allemagne et s’installe à Paris. Elle découvre alors les avant-gardes qui sont en train de révolutionner l’art du XXe siècle, dont les Fauves, et plus particulièrement l’œuvre de Gauguin, et décide de s’orienter vers l’expressionnisme coloré. L’année suivante, elle rencontre Robert Delaunay, qu’elle épouse en 1910.

Ensemble, main dans la main, ils vont s’orienter vers l’abstraction et redéfinir en profondeur l’art moderne. Fascinés par les lumières électriques de la ville et le rythme enivrant de la vie urbaine, caractérisée par la mécanisation grandissante, ils développent un art propre à incarner la vie moderne. La série Prismes électriques, réalisée entre 1913 et 1914 par Sonia, s’inscrit pleinement dans cette quête d’un art à même de transcrire l’intensité de la modernité.

Une œuvre kaléidoscopique

Œuvre monumentale de 2,50 mètres de haut sur 2,50 mètres de large, Prismes électriques n°41 embarque le spectateur dans un tourbillon de couleurs, dynamique et saisissant. Kaléidoscope de lumière, ce tableau abstrait se compose d’un disque diffracté constitué d’une multitude d’anneaux colorés. Sonia Delaunay fixe sur la toile les variations de la lumière électrique et signe une œuvre cosmique aux allures de puzzle arc-en-ciel.

Exposé au Salon des Indépendants en 1914, le panneau surprend les visiteurs par son enchevêtrement de couleurs et de formes abolissant toute perspective. Dès 1912, en réaction à la monochromie du cubisme analytique, Sonia Delaunay s’était concentrée sur la représentation de la lumière par des contrastes simultanés de couleurs. Cette démarche aboutit à la formulation des principes du « simultanéisme », inspiré des théories de Michel-Eugène Chevreul sur l’interdépendance perceptive des couleurs. La juxtaposition de tons dans Prismes électriques illustre parfaitement cette conception esthétique qui fait du contraste de couleurs le cœur de l’œuvre.

Cendrars et le Transsibérien

Cette théorie du simultanéisme, loin de se cantonner aux arts visuels, trouve des échos directs dans la poésie moderne, dont celle de Blaise Cendrars. Le poète franco-suisse, qui fréquente les mêmes cercles que Sonia Delaunay, compose en 1913 son célèbre poème La Prose du transsibérien et de la petite Jehanne de France, récit d’un jeune poète qui relie Moscou à Kharbine en train.





Sonia Delaunay se charge de mettre en forme l’œuvre et participe ainsi au premier « livre simultané » de l’histoire, sorte de poème-tableau de deux mètres de long prenant la forme d’un livre-accordéon. Profondément marquée par le style percutant de Cendrars, Sonia décide en retour de reproduire une partie de son texte dans l’un des panneaux de sa série Prismes électriques. La boucle est bouclée.

Pour retrouver notre article sur l'exposition "Chagall, Modigliani, Soutine" au Musée d'art et d'histoire du judaïsme c'est ici.


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