Les bouleversantes sculptures de bronze de Marc Petit exposées à l'Abbaye d'Auberive
Abbaye d'Auberive
Jusqu'au 26 septembre 2021
D’où viennent ces corps aux traits élancés, aux visages apatrides et aux courbes déliquescentes ? Qui sont ces êtres à mi-chemin entre la vie et la mort, entre la vitalité du mouvement et un passé immémorial, entre le profane et le sacré ? Une inquiétante étrangeté émane de ces sculptures de bronze qui investissent l’écrin de verdure et les espaces d’exposition de l’abbaye cistercienne d’Auberive, fondée au XIIe siècle. Car il y a quelque chose d’anormalement familier dans ces figures rugueuses et coulantes, comme usées par le temps, dont l’altérité apparemment radicale semble pourtant dissimuler une certaine intimité. Ces œuvres déconcertantes, qui nous renvoient sensiblement à notre propre finitude, sont le fruit de l’imagination de Marc Petit, artiste génialement précoce : il réalise ses premières sculptures à l’âge de 14 ans et présentera sa première exposition personnelle dix ans plus tard – constituant, au fil des années, un impressionnant corpus de sculptures et de dessins reliés par ce même élan créateur, entièrement tourné vers la vie et les fondements de l’existence humaine. Dix ans après une première rétrospective à l’abbaye, Marc Petit dévoile une nouvelle série de créations, au sein d’une exposition riche de 280 sculptures et près de 150 dessins. À mesure que le bronze décharné nous présente au vide et nous ramène à notre condition d’être mortel, se dégage finalement une forme de tendresse, liée précisément à cette première impression de révulsion ou d’angoisse qui nous met face à une part de nous-mêmes que nous ne voulions pas voir et qui pourtant nous définit. Il semble toujours manquer quelque chose - ici, un membre, là, une partie du corps aux contours incertains, ou ailleurs, un trou béant – à ces êtres mystérieux, sans âge, sans nom et dont le genre demeure un point aveugle. Après tout, peut-être est-ce là l’apanage de l’artiste que de pouvoir donner voix à l’invisible et donner corps à l’indicible. Si Marc Petit ne part d’aucun modèle en particulier, c’est qu’il cherche moins à incarner des individus de chair et d’os qu’à insuffler à la matière un spectre d’émotions, d’affects, de pleurs et de douleurs, comme une affirmation joyeuse des puissances de la vie.
Focus sur...
Fondée en 1135, l’Abbaye d’Auberive nous accueille dans un écrin de verdure de 6,5 hectares peuplé d’arbres fruitiers. L’abbaye a connu maints destins : vendue comme bien national à la Révolution, elle sera notamment transformée au XIXe siècle en prison pour femmes où sera détenue Louise Michel, figure emblématique de la Commune de Paris, pendant près de deux ans, avant d’être déportée au bagne de Nouvelle-Calédonie. Un lieu chargé d’histoire et d’émotion.
ABBAYE D’AUBERIVE
Jusqu’au 26 septembre 2021
1 place de l’abbaye, 52160 Auberive