Décès de Miss.Tic, figure illustre du street-art parisien
Miss.tic, la mythique street-artiste, est décédée hier, à l’âge de 66 ans. Son style de pochoir, reconnaissable entre tous, la fera survivre encore longtemps, par les ornements rouge et noir croisés aux coins des rues de la capitale, par ses figures féminines ardentes et ses épigrammes chocs.
Vous les avez peut-être croisés sans même les voir, tellement ils sont ancrés dans le paysage urbain parisien. Les pochoirs charnels de Miss.Tic, accompagnés de ses phrases poétiques incisives et irrévérencieuses, ornent nos rues depuis plus de 30 ans. Son esthétique, si particulière, est reconnaissable entre toutes : les lignes ciselées du pochoir, l’impression de mouvement des femmes brunes, fières et fascinantes, les mots d’amour et de colère piquants, jouant sur la musique de la langue. Car ce sont les mots qui priment : Miss.tic, de son vrai nom Radhia Novat, voulait d’abord écrire des poèmes, que les dessins viennent sublimer.
L’artiste est profondément liée à la ville. Elle a grandi à Orly, et après une enfance marquée par la perte de ses parents, elle s’est formée aux arts appliqués et s’est épanouie dans le théâtre de rue et la photogravure. Ses pratiques artistiques l’ont amenée jusqu’en Californie dans les années 80, où elle fréquenta les milieux punk, dont on ressent encore l’influence anarchiste dans ses collages. Depuis son retour, elle n’a cessé d’habiller nos murs de ses silhouettes fougueuses, mais la reconnaissance à attendu le début des années 2000, quand l’art urbain obtient commence à être légitimé. En 1997, elle est même arrêtée pour détérioration, ce qui ne la démotive pas, bien au contraire. Elle expose enfin dans diverses galeries, est engagée pour des contrats privées et publics, et elle réalise l’affiche d’un filme de Claude Chabrol, La Fille coupée en deux. Elle fait aujourd’hui partie de la collection du Victoria and Albert Museum de Londres et du Fonds d’art contemporain de la Ville de Paris. Elle est aussi repérée par le milieu de la mode et dessine pour Kenzo et Louis Vuitton. Autre collaboration surprenante, elle illustre l’édition 2010 du Petit Larousse !
Jusqu’à la fin, et ce malgré la maladie, elle ne s’arrêta pas de créer. Il y a tout juste une semaine, elle présentait ses dernières créations à la foire Urban Art Fair, en miroir avec Ernest Pignon-Ernest, artiste au parcours similaire, de la rue au musée. On espère pouvoir continuer d’admirer longtemps ses héroïnes flamboyantes, dans l’un comme l’autre de ces environnements.